Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/172

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reté que nous lui avons vue à Paris dans Figaro. Jamais on ne sent l’effort, peu à peu sa danse s’anime, et il finit par les transports et l’ivresse de la passion qu’il veut exprimer : c’est tout le degré d’expression dont cet art est susceptible ; ou du moins, pour être exact, je n’ai jamais rien vu de comparable. Vestris, Taglioni, comme tout le vulgaire des danseurs, d’abord ne peuvent pas cacher l’effort ; en second lieu, leur danse n’a point de progression. Ainsi ils n’atteignent pas même à la volupté, premier but de l’art. Les femmes dansent mieux que les hommes ; l’admiration, après la volupté, fait presque tout le domaine de cet art si borné. Les yeux, séduits par le brillant des décorations et la nouveauté des groupes, doivent disposer l’âme à une attention vive et tendre pour les passions que les pas vont peindre.

J’ai bien vu le contraste des deux écoles. Les Italiens admettent sans difficulté la supériorité de la nôtre, et, sans s’en douter, sont bien plus sensibles à la perfection de la leur. Duport doit être content, ce soir on l’a bien applaudi ; mais les véritables transports ont été pour Marianne Conti. J’avais un Français de bon ton à mes côtés qui, transporté par la passion, est allé jusqu’à m’adresser la parole. Quelle indécence ! disait-il à tout moment. Il avait