Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

C’est uniquement à cause de cette circonstance qu’en 1817 la masse du peuple est plus heureuse à Milan et à Vérone qu’à Bologne ou à Ferrare. À l’égard de toutes les personnes qui ont de l’aisance, c’est-à-dire cent louis de rente, la tyrannie est plus visible et plus incommode à Milan et à Venise. Elle s’exerce sur les pamphlets venant de Paris, sur les propos tenus dans les cafés, sur les réunions de gens mal pensants ; mais beaucoup de presbytères de campagne n’y sont pas le centre d’intrigues de libertinage souvent atroces, et qui portent le malheur profond et la rage impuissante, suivie la plupart du temps de la scélératesse dans la moitié des maisons du petit village. Telle est la cause secondaire du nombre de brigands enragés qui infestent l’État de l’Église. La première cause, c’est que l’industrie y est mal récompensée. Pour faire fortune, il faut non travailler constamment et économiser cent écus chaque année, mais avoir une jolie femme et acheter la faveur d’un moine. Et ce n’est pas d’hier qu’il faut suivre ce chemin infâme ; il y a déjà trois cents ans depuis qu’Alexandre VI et son fils César Borgia domptèrent par le poison Astor et les autres petits tyrans des villes de la Romagne (1493-1503). Nous avons vu qu’à moins de posséder un grand nom, il