Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/23

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Dans le pays de la sensation, il faut un miracle visible. Quelque madone, figure céleste copiée du Guide, tourne les yeux, et un pauvre qui jouait l’estropié depuis un an, moyennant une écuelle de soupe et une bouteille de vin chaque jour, est guéri devant des milliers de témoins. C’est ordinairement deux mois après qu’on a commencé à parler de la madone qu’arrive la guérison miraculeuse. Dans le pays de la rêverie et du raisonnement creux, il y a prédication par un nouveau Messie, ou guérison par S. A. Monseigneur le prince de H***, sans prodige visible[1].

11 janvier. — Nous avons trouvé ce soir neuf Anglais chez le cardinal : sept étaient muets ; les deux autres ont parlé pour tous. Ils accablaient d’injures les Italiens et Bonaparte[2]. Entre autres belles choses, ils disaient que l’invasion démoralisante de 1796 arrêta la civilisation de l’Italie, dont le duc de Parme et l’Autriche allaient s’occuper sérieusement. L’un d’eux a beaucoup loué la littérature italienne pour avoir l’occasion de rabaisser celle des Français.

  1. Quand verrons-nous paraître une Histoire de la crédulité faite d’après le modèle d’une histoire de la fièvre jaune ?
  2. Il est fâcheux que ce nom rappelle sir Hudson Lowe. Avoir employé cet homme, et avec un si beau succès, est un souvenir aussi triste que les pontons de 1810.