Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/38

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L’Italien, pour qui la société générale et les jouissances de salon sont impossibles, ne porte que plus de feu[1] et de dévouement dans ses relations particulières ; mais il faut avouer que le voyageur français que j’ai laissé debout au milieu du salon de M. le sénateur de Bologne est en dehors de ces sociétés particulières. L’étranger n’est quelque chose ici que quand il a pu parvenir à exciter la curiosité.

Les premiers jours après mon arrivée, quand M. le cardinal-légat ne me faisait pas l’honneur de m’interroger, et que

    vagues sur ce qu’on appelle la philosophie ; mais l’on est moins indulgent pour l’analyse des faits particuliers. Je supprime, par respect pour l’opinion, un parallèle entre le caractère des Bolonais et celui des bons habitants de Milan. Deux cents de ces petits examens partiels mettraient à même quelque grand philosophe tel qu’Aristote de comparer le caractère des peuples du Midi et celui des peuples du Nord. Diderot appelait cela commencer par le commencement. Ce n’est que par des monographies de chaque passion du cœur humain que l’on pourra parvenir à connaître l’homme ; mais alors tout le monde rira des phrases louches de Kant et autres grands philosophes spiritualistes. La métaphysique est si peu avancée parmi nous, que l’on en est encore à l’ère des systèmes : voyez les progrès de la physique et de la chimie, depuis que l’on a laissé les systèmes à MM. Azaïs et Bernardin de Saint-Pierre. En fait de logique, les jeunes Français arrivés dans les salons depuis la Restauration sont bien moins avancés que la génération formée dans les écoles centrales. Il faudra revenir à ces écoles dès que nous serons délivrés des jésuites.

  1. Cabanis nous apprend que l’homme n’a chaque jour à dépenser qu’une certaine quantité limitée de cette substance, jusqu’ici peu connue, nommée fluide nerveux. On ne peut pas dépenser son bien de deux manières ; l’homme fort aimable dans un salon le sera moins avec ses amis intimes.