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en ville pour voir la marchandise. Il fit tout au monde pour amener M. N. avec lui à sa bastide ; les instances durèrent bien 15 ou 20 minutes ; nous, témoins à portée, nous craignions que le pari ne fût perdu. Ces 20 minutes auraient pu suffire à la rigueur pour conclure l’affaire. Mais le Marseillais, trouvant M. N. inébranlable, finit par lui dire : « À demain les affaires », et il fit partir au galop la rosse qui menait son petit cabriolet.

Il y a loin de là au caractère lyonnais ; plus loin encore mais dans un autre sens, au caractère parisien. M. de Villèle, avait dit à M…, un de ses courtisans, que la qualité la plus nécessaire dans sa position était de savoir s’ennuyer. Deux jours après, ce courtisan allant lui porter un travail sur une question que M. de Villèle devait défendre le jour même à la tribune, le trouve, à 7 heures du matin, écoutant les conseils de M. S. de L. Le ministre habile s’en débarrasse avec peine, et se tournant vers son courtisan : « Vous voyez », lui dit-il.

Le Marseillais est absolument incapable de la première qualité du Parisien qui veut faire fortune : savoir s’ennuyer, et encore plus s’il se peut, de la seconde qualité, ne jamais blesser personne. Si un Marseillais parle d’un négociant de sa