Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/164

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jolies villas à l’italienne s’élevaient, entourées de jardins, dans des rues spacieuses. Le théâtre, le musée, la bibliothèque, de magnifiques hospices, les statues monumentales de Guttemberg et de Goethe, le cimetière nouveau, sur la colline, avec ses grands horizons, ses galeries ouvertes, ses sculptures, ses corbeilles de fleurs, ses salles vigilantes où la mort apparente est protégée contre la précipitation des vivants[1] ; toutes les sollicitudes, toutes les bienfaisances, toutes les élégances de la vie moderne donnent au citoyen, donnent à l’étranger dans Francfort un sentiment de sécurité, de bien-être et de douce animation que je n’ai rencontré au même degré nulle part.

Au temps dont je parle, une seule chose faisait tache dans ce riant tableau : le Ghetto et sa population frappée d’anathème par le préjugé chrétien. En dépit des décisions du congrès de Vienne, il avait fallu des années, la puissance croissante des Rothschild, le crédit des Metternich et des Hardenberg, l’effort des hommes éclairés, de mon oncle Bethmann

  1. Avant de clouer le mort dans sa bière, on le laisse, pendant un temps plus ou moins long, couché sur un lit de repos, la main sur le cordon d’une sonnette que mettrait en mouvement la plus imperceptible agitation d’un doigt léthargique. Tout à côté se tient le gardien. Dans les salles voisines tout est préparé pour de prompts et énergiques secours. Ou s’étoune qu’une telle précaution ne soit pas organisée dans toutes les villes d’Europe. Elle fait le plus grand honneur à la municipalité de Francfort qui l’a établie une des premières.