Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/179

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n’y prirent pas garde ou bien ne voulurent point me parler d’un phénomène de la vie physique qu’en d’autres temps peut-être on eût attribué à quelque puissance démoniaque. Le médecin ne fut pas appelé. Ce fut tout aussi bien par le fait, puisque, un an après, jour pour jour, à peine rentrée sous le toit maternel, tout reprit son cours régulier, sans que cette étrange suspension eût causé en moi aucune perturbation organique.

On se tromperait néanmoins, si l’on inférait de ce qui précède que je souffrais, au Sacré-Cœur, une contrainte quelconque.

Je m’étais très-vite pliée, accoutumée, je le croyais du moins, à la règle du couvent. Qu’était-ce donc que cet arrêt de vie qui se faisait en moi ? une révolte de la nature physique quand la nature morale gbéissait ? une protestation de l’instinct persistant contre la raison persuadée ? Ce phénomène s’est reproduit dans tout le cours de mon existence d’une manière très-constante et vraiment extraordinaire. Douée d’une volonté forte et d’un grand empire sur moi-même, je résistais aisément, en apparence, aux violences du sort ou des passions ; je gardais tous les dehors de la tranquillité ; mais la nature domptée dans mon âme s’exaltait dans les phénomènes inconscients de la vie végétative ; elle se vengeait par le trouble de