Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/188

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conque, si sainte qu’elle fût, me répugnait ; la pensée d’une trahison envers mes compagnes, même autorisée, sollicitée, récompensée par nos professes, m’inspirait une véritable horreur.

L’amitié des élèves m’était chère. L’estime des religieuses ne venait que bien après, et je pouvais m’en passer si elle ne s’accordait pas avec ma propre estime. En outre, les pratiques des Enfants de Marie, la récitation du chapelet, le scapulaire, ce laid morceau de laine peinte, que je ne pus jamais me résoudre à suspendre à mon cou, les Sacrés-Cœurs saignants ou percés de flèches, ne m’attiraient point. Déjà mon instinct du beau, les curiosités élevées de mon esprit se détournaient de ces laideurs et de ces abêtissements. J’acceptais les grands mystères du catholicisme : la Trinité, l’Incarnation, la Chute, la Rédemption, par cela seul qu’ils étaient grands. J’aimais les cérémonies du culte à cause de leur beauté symbolique ; mais les petites dévotions, les petits miracles, la petite imagerie, les niais emblèmes, toutes les fadeurs, toutes les superstitions d’un catholicisme idolâtrique et sensuel, abaissé à la mesure des petits esprits, me répugnaient invinciblement[1]. Ces dames

  1. À aucune époque de ma dévotion, la pensée ne me serait venue de prier aucun saint en particulier dans un lieu spécial ni de demander une entremise auprès de Dieu pour obtenir un privilège, une faveur quelconque.