Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/250

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D’autre part, ma mère, mon frère, la princesse de la Trémoïlle, toujours interrogée comme l’oracle en ces occasions, l’oncle Bethmann par correspondance, se consultaient. Le caractère et la situation de M. de Lagarde ne souffraient pas d’objections, mais la princesse le trouvait, chose grave ! trop libéral. Quant à mes parents, ils eussent été contents d’une telle alliance, mais ils craignaient de me donner pour mari un hommedéjà tropatteint parl’âgeetpaiia souffrance.

Les jours et les mois passaient ainsi. Nous étions au mois de juillet de l’année 1825. Tous les ans, vers cette époque, le général de Lagarde se rendait aux eaux de Gastein pour sa blessure. Le jour de son départ approchait. Jamais je n’en avais ressenti une peine aussi vive.

Une après-midi, il vint chez nous pour nous dire adieu : il partait le lendemain. J’ai su depuis que, en butte à de vives instances pour un mariage dans sa parenté, il. avait pris à deux mains son courage et résolu, à ce dernier moment, de s’expliquer enfin avec moi. Depuis près d’une heure déjà M. de Lagarde était au salon avec ma mère, quand je me décidai d’y entrer. Il m’avait fallu du temps pour composer mon visage. Quand j’ouvris la porte du salon, M. de Lagarde était levé et prenait congé. Je m’avançai vers lui, et lui tendant la main : — Vous partez, lui dis-je, et les larmes me venaient aux yeux.