Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/278

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

naient à la bonne compagnie, que j’ai vue si brillante encore dans ma jeunesse, une perfection d’intimité et aussi une puissance d’opinion que les sociétés nouvelles et mobiles ne sauraient atteindre. Il s’y produisait, dans une fréquentation à la fois libre et discrète, des nuances d’expression d’une délicatesse infinie. Il y régnait, entre personnes de condition et d’éducation entièrement semblables, un sous-entendu gracieux, une convention facile, observée de tous sans effort, qui prévenait la dispute, écartait l’importunité, détournait ou palliait les fâcheux discours. Il en résultait, sans doute, quelque chose de peu accentué et de trop semblable qui tournait aisément à la monotonie, mais pourtant les salons, les châteaux, les familles avaient chacun sa physionomie propre et sa manière d’être distincte. Je choisirai dans les différents groupes du faubourg Saint-Germain les personnes que j’ai le mieux connues, ou celles qui, tout en ne faisant que passer devant mes yeux, m’ont laissé l’impression la plus vive, afin de donner l’aspect général de ce monde évanoui.