Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/285

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révolution de juillet, je vis assez souvent le roi, soit aux réceptions, soit aux bals ou aux spectacles du château, soit dans les soirées intimes de la Dauphine. Les habitudes et l’étiquette de la maison de Bourbon ayant aujourd’hui une sorte d’intérêt historique, je dirai ce que j’en ai vu.

L’usage voulait alors que les nouvelles mariées fussent, à leur entrée dans le monde, présentées en cérémonie au roi et aux princes. On était pour cette présentation assistée de deux marraines, choisies parmi les parentes les plus proches ou les plus considérables. Comme le cérémonial était compliqué, on prenait, pour s’y préparer, des leçons spéciales du maître à danser de la cour, M. Abraham. C’était lui qu’on avait appelé aux Tuileries, dans les premiers jours de la Restauration, quand la duchesse d’Angoulème s’occupa de rechercher l’ancienne étiquette ; c’était lui encore qui avait été chargé d’enseigner à la vive Napolitaine qui venait épouser le duc de Berry les lenteurs de la révérence, l’art de tenir les pieds en dehors, et les autres éléments des grâces françaises. Seul, après plus d’un quart de siècle d’émigrations, de prisons, de désastres, M. Abraham, les avait retrouvées intactes dans sa mémoire. Seul, il pouvait professer le beau maintien traditionnel. Selon la coutume, M. Abraham, en jabot de dentelle et en manchettes, me donna trois répétitions de la révérence au