Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/292

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aussi. Elle jetait sa tapisserie ; et, d’un regard, commandait à son cercle la dispersion. Dans le même temps, à quelque péripétie qu’on fût de la marche des échecs, le Dauphin, quittant tout, se rapprochait du roi respectueusement. On échangeait alors deux ou trois paroles ; puis le roi, s’ach minant vers la porte qui conduisait à ses appartements, nous adressait, à chacune en particulier, quelques mots ; après quoi, il se retirait, en faisant une inclination de tête générale à toute l’assemblée. À peine le roi disparu, le Dauphin et la Dauphine disparaissaient également. Les invités rentraient, chacun chez soi, très-flattés assurément, très-enviés, car cette faveur des petites soirées de la Dauphine passait pour la plus grande du monde, mais fort peu avancés en réalité dans l’intimité d’esprit des augustes personnes qui les admettaient de la sorte au silence et au vide imposant du cercle de famille.

Madame Royale, duchesse d’Angoulême, qui portait, malgré sa maturité — elle avait alors quarante-six ans — depuis l’avènement de son beau-père, le titrejuvénile de Dauphine[1], n’était pas douée des agréments d’esprit et de manières qui avaient rendu si attrayants l’entretien

  1. On sait que le titre de Dauphin fut donné pour la première fois, en 1355, au fils aîné du roi de France. À l’avènement de Charles X, en 1824, il sonna étrangement aux oreilles des générations nouvelles. On ne savait plus du tout ce que cela pouvait bien vouloir dire.