Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/95

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Trémoïlle, y passait d’ordinaire toute l’arrière-saison. Chasseur paresseux[1], indolent joueur de whist, dormeur inéveillable, amateur de longs repas et de plaisirs commodes, volontiers loin de sa femme dont l’esprit vif et piquant fatiguait son flegme, il était attiré chez nous par les petits bois giboyeux, par la partie de whist établie en permanence au salon dans les jours de pluie, par les talents d’Adelheid, et peut-être aussi par le mien qu’il mettait à contribution chaque soir après dîner en me demandant de lui jouer sur le piano ce qu’il appelait un joli petit air qui l’empêchait de s’endormir avant l’heure de s’aller coucher. MM. d’Andigné, de la Béraudière, d’Autichamp, de Bourmont, — « ce pauvre Bourmont », disait-on depuis Waterloo, — de Salaberry, de Maccarthy, de Labourdonnaye, etc., venaient au Mortier incessamment.

Les récits les plus circonstanciés des moindres combats de la Vendée, la recherche des causes de ses désastres, les comparaisons entre les chefs d’autrefois, Lescure, Bonchamp, d’Elbée, Larochejacquelein, Charette, et les chefs d’aujourd’hui, faisaient, entre mon père et ses amis le fond de l’entretien. On y mêlait des critiques acerbes de Louis XVIII. Chose bizarre ! on n’épargnait pas même le comte d’Artois, qu’un "mot cruel de Charette avait à jamais flétri. La table du

  1. Appendice G.