Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/194

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timent. — Enfin, je le répète ; il étoit là-dessus d’un sérieux dont il n’étoit pas possible de le faire sortir. — Il murmuroit, se fâchoit, perdoit patience lorsqu’il voyoit des personnes, de qualité surtout, qui avoient moins d’attention sur les noms de leurs enfans, que d’inquiétude pour savoir si c’étoit le nom de Cupidon ou de Diane, ou de Milord, qu’elles donneroient à leur chien favori.

« Rien, disoit-il, n’est si choquant ; cela est accompagné d’un surcroît d’énormité qui révolte. Un homme dont le caractère a été noirci par quelque calomniateur, peut parvenir à se justifier… si ce n’est pas pendant la vie du méchant qui l’a accablé, ce sera après sa mort ; mais quand une fois on a donné, sans réflexion, un nom vil à quelqu’un, le tort est irréparable… je l’ai vu. C’étoit un petit homme ; mais il avoit du mérite, du génie. On pouvoit le citer pour la douceur et la pureté de ses mœurs. — Eh bien ! on lui avoit donné Saint Maur pour patron..... Il s’appeloit Pion. — Devinez, madame, ce que faisoit dire de lui l’assemblage équivoque de ces au deux noms ? — La législation a quelquefois étendu son empire sur les surnoms, elle en a ôté ce qu’ils avoient de choquant,