Aller au contenu

Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la moitié de la chère existence d’un philosophe ? Mon père comptoit bien que le sien prendroit pour le moins par la suite le nom de système Shandyen. —

Mais il étoit peut-être aussi sensible que mon oncle à tout autre cas qui pouvoit jeter de la honte sur la famille, et ni lui, et j’ose le dire, ni Copernic lui-même, n’auroient jamais parlé de cette histoire, si la vérité ne l’avoit exigé. — Amicus Plato, disoit mon père, sed magis amica veritas. Il expliquoit ce passage, à sa façon, à mon oncle Tobie : Dinach étoit ma tante, et j’en conviens, disoit-il ; mais la vérité est ma sœur.

Cette contradiction, dans l’humeur des deux frères, étoit une source inépuisable de querelles et de petits chagrins. L’un ne pouvoit pas souffrir qu’on parlât toujours d’une tache aussi désagréable, et l’autre ne laissoit pas passer un jour sans la rappeler. « Pour l’amour de Dieu, s’écrioit mon oncle Tobie, par la considération, frère, que vous avez pour moi, et par égard pour nous tous, laissez de côté cette histoire de notre tante, et ne troublez point le repos de ses cendres ! — Comment pouvez-vous ? — Comment est-il possible que vous ayez si peu de sensibilité, si peu de com-