Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/222

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vole produit quelquefois les plus grandes découvertes.

Les digressions sont incontestablement la lumière, la vie, l’ame de la lecture. — Ôtez-les par exemple de ce livre, il seroit aussi bon de mettre le livre tout-à-fait de côté. — Une langueur accablante, une monotonie insipide régneroient à chaque page ; il tomberoit des mains. — Rendez-les à l’auteur ; il brille, il amuse, il se varie, il chasse l’ennui.

Le seul point est de savoir les manier adroitement, pour qu’elles soient utiles au lecteur et à l’auteur. On ne conçoit pas l’embarras qu’elles causent ordinairement à un écrivain. — Son sort est digne de pitié. — J’en vois qui commencent une digression, et j’observe que l’ouvrage des ce moment est arrêté. — Continuent-ils le sujet principal : il n’y a plus de digression.

Voilà donc un ouvrage manqué, et il a fait suer sang et eau à l’insipide auteur. — Oh ! ce n’est point ainsi que j’ai agi. J’ai tellement arrangé celui-ci dès le commencement, j’ai tellement combiné le sujet principal et les parties accessoires, j’ai si bien ménagé mes intersections, compliqué et entrelacé les mouvemens digressifs et progressifs, j’ai formé du tout un tel engrenage, que la machine