Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/248

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Mon oncle Tobie, la seconde année, se procura les ouvrages de Ramilli et de Canateo, traduits de l’italien. Il se donna Stévinus, Marolis, le chevalier de Ville, Lorini, Cohorn, Shecter, le comte de Pagan ; il acheta le maréchal de Vauban, Blondel : il fit enfin une collection si ample d’ouvrages sur l’architecture militaire, que Don-Quichotte n’avoit peut-être pas une suite plus nombreuse de livres de chevalerie, lorsque le curé et le barbier firent l’invasion de sa bibliothèque.

Mais tout cela ne suffisoit pas. Mon oncle Tobie, dans la troisième année, vers le mois d’août 1699, jugea qu’il ne pouvoit se dispenser de prendre quelque teinture de l’artillerie. — Il voulut, comme de raison, puiser ses connoissances dans la source primitive. — Il lut pour cela les œuvres de Tartaglia. Il passe pour être le premier qui ait découvert qu’un boulet de canon, dans sa course progressive, ne décrit pas une ligne droite. Mon oncle Tobie voulut donc le lire, et il prouva à mon oncle Tobie qu’il étoit absolument impossible que le boulet conservât cette direction dans toute sa route.

— La recherche de la vérité est sans fin. —

Mon oncle Tobie ne fut pas si-tôt convaincu