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Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/360

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Et ne point réussir dans une pareille circonstance, c’étoit recevoir une humiliation intolérable. —

Son raisonnement étoit appuyé sur la force de deux axiômes, qui lui paroissoient des arcs-boutans à toute épreuve, et que voici.

Selon lui, un homme étoit infiniment plus riche avec une once de son esprit personnel, qu’avec vingt milliers pesant de l’esprit d’autrui. — C’étoit-là le premier axiôme.

Le second étoit que l’esprit de chaque homme provenoit de son ame propre, et non de celle d’autrui. — Cet axiome avoit sa source dans le premier.

Toutes les ames, disoit mon père, sont égales : c’est l’état de la nature. Je sais cependant qu’il y a très-fréquemment une grande différence entre les esprits. Les uns sont légers, frivoles, agréables ; les autres sont lourds, réfléchis, maussades. Ceux-ci sont d’une pénétration vive ; ceux-là ne conçoivent rien. Mais cela ne vient point de ce que la substance pesante des uns soit supérieure à celle des autres..... Non, non, ajoutoit-il ; il faut chercher la cause de cette différence dans l’organisation plus ou moins heureuse de la partie du corps où réside l’ame.

Mon père, entiché de ce système, s’étoit