Aller au contenu

Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/438

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’inquiétoit pas davantage de toutes ces recherches, de toutes ces disputes vaines sur l’infini, la préscience, la liberté, la nécessité, et tant d’autres questions subtiles dont l’inconcevable théorie avoit bouleversé tant de cervelles. Jamais la sienne n’en avoit été agitée. Mon père le savoit ; et si la solution fortuite qu’il lui donna lui fit plaisir, elle ne le surprit et ne le déconcerta pas moins.

Mais, dit mon père, vous entendez donc cette théorie ?

Moi ? point du tout, reprit mon oncle Tobie.

Point du tout ?… il n’est pas possible, frère, reprit mon père, que vous n’ayiez quelque idée de ce que vous venez de dire.

Pas plus que ma béquille, je vous assure, répondit mon oncle Tobie.

Bonté du ciel ! s’écria mon père, en levant les yeux et en joignant les mains. Il y a dans ton ignorance, frère Tobie, une dignité, une honnêteté si admirables, que ce seroit presque faire un crime que de te l’enlever pour y substituer la science ! Cependant, écoute

Là mon père emprunta un long passage de Lock, puis l’amplifia, le commenta, le compara, et fit des applications… « Si nous jetons les yeux en nous-mêmes, disoit-il, que