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Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/476

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les fortifications. Elle s’en défendit d’abord : mais l’idée de n’être point vue, qui influe toujours si vivement sur l’esprit des femmes, seconda les instances de Trim, et la voilà qui entre avec lui dans le Boulingrin.

Cela ne se fit pas assez secrètement pour que la renommée, avec ses cent trompettes, n’en portât la nouvelle de tous côtés. Elle vint frapper les oreilles de mon père dès le lendemain matin à son réveil ; et sans compter les conjectures malignes, on y joignit la circonstance lamentable de la destruction complette du pont-levis curieux que mon oncle avoit fait faire sur le fossé, d’après la méthode hollandaise. Il étoit tellement fracassé, qu’il n’en étoit pas resté deux morceaux dans leur assemblage.

Mon père, ainsi qu’on aura pu le remarquer, n’avoit pas une prodigieuse estime pour la marotte de mon oncle Tobie, et il ne lui arrivoit jamais d’échec dans ses entreprises, que ces accidens ne chatouillassent son imagination outre mesure. Cependant, à moins que mon oncle Tobie ne le vexât par quelque explosion guerrière, ils n’excitoient jamais que son sourire. La triste aventure du pont-levis semblait plus analogue que toute autre à son humeur. Il s’en faisoit un