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Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/67

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Si elles le sont toutes les deux, ce sera toujours dans un sens différent.

En voyant une verte prairie couverte d’agneaux, l’un n’y verra que de l’herbe et des moutons, tandis que l’autre y dressera tout de suite un lit de fleurs à la volupté.

Le physicien, un beau jour de printems, dira que le soleil brille, mais n’échauffe pas ; et le poëte, à ses côtés, le comparera à l’œil d’Iris, qui brille et échauffe également.

Vous voyez, par conséquent, que l’esprit est à double entente : quelle pitié, mesdames, que la double entente ne soit pas de l’esprit !

L’on m’accorde de la saillie, de l’originalité, l’art des descriptions. Qu’est-ce que l’esprit, s’il n’est pas compris dans ces attributs ? Si c’est autre chose, combien peu il est nécessaire quand on les possède !

Faut-il que tous les mets soient piquans ? ne sait-on pas que le meilleur cuisinier est celui qui mélange si bien tous ses ingrédiens, qu’une saveur ne domine jamais sur l’autre ? Les mauvais appétits ont seuls besoin d’être stimulés.

Les anciens appeloient esprit la capacité, l’invention, l’imagination. Martial fut le premier qui le réduisit à un seul point ; et depuis