Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/494

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n’y gagne rien. — Car considérez, monsieur, que tout le monde voulant être présent quand on le rase, (quoiqu’il n’y ait aucune règle sans exception) et personne ne voulant se raser sans miroir, crainte d’accident, — cette situation, comme toute autre, laisse nécessairement des impressions particulières sur le cerveau. —

Oui, je le maintiens. Les idées d’un homme dont la barbe est forte, deviennent sept fois plus nettes et plus fraîches sous le rasoir ; — et si cet homme pouvoit, sans inconvénient, se raser du matin au soir, ses idées parviendroient au plus haut degré du sublime. — Je ne sais comment Homère a pu si bien écrire avec une barbe de capucin ; — mais comme son talent contredit mon système, je ne veux pas m’y arrêter, et je retourne à ma toilette.

Louis de Sorbonne dit que la toilette n^est qu’une affaire de corps ; mais il se trompe. L’ame et le corps ne sauroient se séparer ; un homme ne sauroit s’habiller, sans que ses idées se portent sur son habillement ; et s’il se met en gentilhomme, ses idées s’ennoblissent ; de sorte qu’il n’a qu’à prendre la plume et se peindre dans son style.

Ainsi, messieurs, quand vous voudrez sa-