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Page:Stevens - Contes populaires, 1867.djvu/225

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FORTUNÉ BELLEHUMEUR.

M. Fortuné feignant enfin de s’apercevoir qu’on lui parlait, répondit tout à coup d’une voix à casser les vitres :

— Mon défunt père Machabée-Timothée-Barnabé Bellehumeur dit Sans Chagrin, commerçait dans les peaux, et depuis vingt ans je fais comme lui, pour vous servir.

— Monsieur Bellehumeur est sourd comme un pot, exclama la galerie.

— Ah ! queu nez !

— Ah ! quel nez !

— Quel grand nez ?

— Queu long nez !

— Romulus ! chante-nous donc la chanson

— Quelle chanson ?

— Mais tu sais bien la chanson que tu chantais le printemps dernier, sur mon épinette, et qui nous a tant fait rire :

Ah ! quel nez I ah ! quel nez…
Vraiment, j’en suis démonté !…

Lecteurs, si vous n’êtes pas condamnés à entendre cette effroyable chanson, rendez-en grâces à ce pauvre M. Sagamité qui avait profité de cet intermède comique pour se débarbouiller, donner un dernier coup d’œil à la table et finalement venir annoncer que le souper était servi.

C’est ce qu’attendait avec une vive impatience M. Fortuné Bellehumeur. Sans demander la permission à personne, il alla présenter son bras à Mlle Torticoli, d’une façon fort civile ; mais avant qu’elle fût revenue