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PIERRE CARDON.

sier savait se montrer cependant, en certaines occasions, d’une prodigalité qui l’étonnait lui-même. En cette occasion, il se surpassa, car il célébrait trois fêtes à la fois : celle de son glorieux patron d’abord, la sienne ensuite, et enfin l’arrivée du piano.

Il est donc parfaitement inutile de dire qu’il fit préparer un véritable festin ; — quinze couverts, ni plus ni moins, — mais nous ajouterons, pour donner une idée quoiqu’imparfaite de sa splendeur, que la vaisselle des alentours avait été mise en réquisition.

Après la messe, les conviés, voisins pour la plupart, arrivèrent à la file. Bientôt il ne manqua plus que le père Martin et Marie. En attendant leur venue, Catherine qui n’avait pas de temps à perdre, pria les convives de passer dans la grand’chambre, et les y laissa en extase devant le piano fermé. Leur admiration naïve, à la vue de ce magnifique instrument, ne cessa qu’à l’arrivée de Marie et de son père, pour faire place aux compliments d’usage, et aux franches poignées de main.

— Allons, la compagnie, dit le père Martin, dont la bonne et honnête figure rayonnait de contentement, le dîner est paré, vive la joie et la St. Jean Baptiste !

Bons lecteurs, avez-vous jamais été assez favorisés du ciel pour faire partie d’un de ces repas joyeux, — à la campagne bien entendu, — car dans les festins de nos villes, on parle plus qu’on ne s’amuse, et vous haïssez comme moi, je n’en doute pas, les discours à table ; — si vous y avez déjà assisté, vous comprendrez facilement que ma plume — j’allais dire la langue, excusez la méprise, — est trop pauvre pour décrire cette verve si franche, cet entrain si plein de charmes et de laisser aller qui animent ces réunions ; dans le cas contraire, je vous souhaite cette bonne fortune de tout mon cœur et en attendant, je vous plains.