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PIERRE CARDON.

homme avait été à même d’apprécier les vertus solides de sa future compagne, plus sa détermination de lui confier son bonheur était devenue inébranlable. En la voyant, sa pensée se reportait avec complaisance vers cet heureux foyer qui avait vu grandir son enfance, et il le reconstruisait, pièce à pièce, avec sa chère Marie.

Cette touchante confiance ne devait pas être trompée. Les fêtes de noces une fois finies, il suffit à la jeune femme, de quelques semaines, pour rendre à la maison de son époux, l’aspect de ses meilleurs jours. Tout devint propre, rangé, luisant, depuis la cave jusqu’au grenier, de la cuisine au coin le plus obscur du magasin, car l’œil exercé de Marie se promenait partout, et aucun détail, si minime qu’il fût, n’échappait à sa vigilance.

Au besoin, elle ne dédaignait pas de prendre le balai ou le plumeau, et montrait l’exemple, plutôt que de gourmander un serviteur maladroit. Commandant d’ailleurs avec fermeté, mais toujours poliment, ses ordres étaient exécutés à la lettre, et les engagés qui d’abord murmuraient tout bas contre cette surveillance continuelle, avaient fini par la trouver naturelle, et n’en aimaient que davantage leur jeune maîtresse, parce qu’il y avait toujours entre eux respect réciproque. L’activité qu’elle déployait, redoublait celle de ses serviteurs, et créait entre eux cet esprit d’émulation qui contribue si puissamment à assurer la prospérité d’une maison.

À la vue de l’étonnante transformation qu’avait subie son intérieur, si négligé depuis la mort de son père, le jeune Cardon se sentit pris d’admiration pour sa femme. L’extérieur n’avait pas été oublié non plus. Sur le devant, du côté regardant la rivière et la grand’route, une couche de peinture jaunâtre avait rajeuni