Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/290

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Alors Alan siffla de nouveau ; l’homme se rapprocha davantage, et d’autres coups de sifflet le guidèrent enfin vers l’endroit où nous étions.

C’était un homme en haillons, sauvage, barbu, d’environ quarante ans, les traits hideusement ravagés par la petite vérole, et qui avait l’air à la fois farouche et borné.

Bien qu’il ne parlât qu’un peu de mauvais anglais, Alan, selon son habitude, plein de délicatesse, ne voulut pas le laisser parler gaélique en ma présence.

Peut-être cette langue étrangère le faisait-elle paraître plus rétif qu’il ne l’était en réalité, mais il me sembla qu’il ne montrait guère d’empressement à nous rendre service, et que le peu qu’il en montrait était ce que la terreur lui en laissait.

Alan eût désiré qu’il se chargeât d’un message pour James, mais le fermier ne voulut pas entendre parler d’un message.

Il l’oublierait, disait-il de sa voix criarde.

— Il lui fallait une lettre, ou il nous laisserait là.

Je crus qu’Alan serait à bout de ressources, car dans ce désert nous n’avions rien de ce qu’il fallait pour écrire.

Mais il était homme de ressources à un point que j’ignorais.

Il fouilla le bois jusqu’à ce qu’il eût trouvé une plume de pigeon ramier, dont il tailla le bout, il se fit une sorte d’encre avec de la poudre tirée de sa corne et de l’eau du ruisseau, et déchirant un angle de sa nomination d’officier français, qu’il portait dans sa poche comme un talisman contre la potence, il s’assit et écrivit ce qui suit.