Page:Stevenson - L’Île au trésor, trad. Varlet.djvu/96

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
92
L’ÎLE AU TRÉSOR

lui-même aurait hésité à s’embarquer avec eux. Eh bien, tiens, je te le dis, je ne suis pas vantard, mais quand j’étais quartier-maître, ils n’avaient rien de l’agneau, les vieux flibustiers de Flint. Oh ! tu peux être sûr de ton affaire sur le navire du vieux John.

— Eh bien, maintenant je peux te l’avouer, reprit le gars, la combinaison ne me plaisait pas à la moitié du quart ; mais maintenant que j’ai causé avec toi, John, j’en suis. Tope là !

— Tu es un brave garçon, et fin, avec ça, répliqua Silver, en lui secouant la main si chaleureusement que la barrique en trembla. Je n’ai jamais vu personne mieux désigné pour faire un gentilhomme de fortune.

Je commençais à saisir le sens de leurs expressions. Un « gentilhomme de fortune », pour eux, ce n’était ni plus ni moins qu’un vulgaire pirate, et le dialogue que je venais de surprendre parachevait la corruption de l’un des matelots restés honnêtes — peut-être le dernier qui fût à bord. Mais sur ce point je devais être bientôt fixé. Silver lança un léger coup de sifflet, et un troisième individu survint, qui s’assit auprès des deux autres.

— Dick marche, lui dit Silver.

— Oh ! je savais bien que Dick marcherait, prononça la voix du quartier-maître, Israël Hands. Ce n’est pas un imbécile que Dick… (Il roula sa chique et cracha.) Mais dis, Cochon-Rôti, je voudrais bien savoir combien de temps nous allons rester à bouliner comme un bateau à provisions ? Crénom ! j’en ai plein le dos du capitaine Smollett. Il y a assez longtemps qu’il m’embête. Tonnerre ! Je veux aller dans la cabine, moi aussi. Je veux leurs cornichons, et leurs vins, et le reste.

— Israël, dit Silver, tu n’as pas beaucoup de