Page:Stevenson - Le Maître de Ballantrae, 1989.djvu/210

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– Oh ! dit-il, nous ne sommes plus à Durrisdeer, et j’ai pris mes précautions. Sa réputation l’attend ; j’ai préparé à mon frère sa bienvenue. D’ailleurs, le hasard m’a servi ; car j’ai retrouvé ici un marchand d’Albany qui l’a connu après 45, et qui le soupçonne fort d’un assassinat : il s’agirait d’un nommé Chew, Albanien également. Personne ici ne sera étonné de me voir lui refuser ma porte ; il ne sera pas autorisé à voir mes enfants, ni même à saluer ma femme ; quant à moi, j’admettrai envers un frère cette exception, qu’il puisse me parler. Je perdrais mon plaisir, autrement, – dit Mylord, en se frottant les mains.

Après quelques réflexions, il expédia des messagers, avec des billets convoquant les notables de la province. Je ne me rappelle pas sous quel prétexte, mais il réussit ; et lorsque notre vieil ennemi apparut sur la scène, il trouva Mylord en train de se promener à l’ombre des arbres, devant la façade de sa maison, avec le gouverneur de la ville d’un côté, et plusieurs grands personnages de l’autre. Mylady, qui était assise dans la véranda, se leva d’un air pincé, et emmena ses enfants à l’intérieur.

Le Maître, bien vêtu et une élégante épée de ville au côté, salua la compagnie d’une manière distinguée, et fit un signe de tête familier à Mylord. Mylord, sans tenir compte du salut, regarda son frère les sourcils froncés.

– Eh bien, monsieur, dit-il enfin, quel mauvais vent vous amène, ici en particulier, où (pour notre malheur commun) votre réputation vous a précédé ?

– Votre Seigneurie est priée d’être polie s’écria le Maître, avec un sursaut.

– Je tiens d’abord à être clair, répliqua Mylord ; car il est indispensable que vous compreniez votre situation. Chez nous, quand on ne vous connaissait pas bien, il était encore possible de garder les apparences ; ce serait tout à fait inutile dans cette province ; et j’ai à vous dire que de vous, je me lave les mains : j’y suis résolu. Vous m’avez déjà presque réduit à la mendicité, comme vous avez ruiné mon père avant moi, – après