86 LE ROMAN DU PRINCE OTHON
dent de l’homme courageux. Il ne se montra aucunement ému à cette irruption, et salua avec une sorte d’aisance moqueuse.
— À quoi dois-je attribuer l’honneur de cette visite ? demanda-t-il.
— Vous avez mangé mon pain, répondit Othon ; vous m’avez pris la main, vous avez été reçu sous mon toit. Quand vous ai-je manqué de courtoisie ? Qu’avez-vous demandé qui ne vous ait été octroyé comme à l’hôte honoré ? Et voilà, Monsieur, frappant avec colère sur le manuscrit, voilà votre reconnaissance !
— Votre Altesse a lu mes papiers ? dit le baronnet. C’est, en vérité, un honneur pour moi. Mais l’esquisse est fort imparfaite. J’aurai maintenant beaucoup à ajouter. Je pourrai dire que le prince que j’avais accusé de paresse est plein de zèle pour le département de la police, et qu’il se charge lui-même de ses devoirs les plus déplaisants. Je serai à même de raconter l’incident bouffon de mon arrestation, ainsi que la singulière entrevue dont vous m’honorez à présent. Quant au reste, j’ai déjà communiqué avec mon ambassadeur à Vienne, et, à moins que vous ne vous proposiez de m’assassiner, je serai en liberté, que cela vous plaise ou non, avant une semaine. Car je ne puis guère croire que le futur empire de Grunewald soit déjà assez mûr pour entrer en guerre avec l’Angleterre. Je suis donc, je pense, un peu plus que quitte envers vous. Je ne vous dois point d’explications : le tort est de votre côté. Mais, si vous avez étudié mes écrits avec intelligence, vous me devez, vous, une forte dette de recon-