Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/186

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corps une machine à gagner de l’argent  » la lui rend méprisable en tant qu’ « être humain ».

Son jugement est celui-ci : la prostituée n’est pas un être humain, ou : par le fait qu’une femme se livre à la prostitution, elle se déshumanise, elle se met au ban de l’humanité. Puis : le Juif, le Chrétien, le Théologien, etc., n’est pas Homme ; plus tu es Juif, etc., plus tu es loin d’être Homme. Et voici de nouveau le postulat impératif : rejette loin de toi tout a parte, que ta critique le détruise ! Ne sois ni Juif, ni Chrétien, sois Homme et rien qu’Homme. Mets ton humanité au-dessus de toute spécification limitative, sois par elle un homme sans restriction, un « homme libre » ; autrement dit, reconnais dans l’humanité l’essence déterminante de tous tes prédicats.

Je réponds : Certes, tu es plus que Juif, plus que Chrétien, etc., mais tu es aussi plus qu’Homme. Tout cela ce sont des idées, tandis que toi tu as un corps. Penses-tu donc pouvoir jamais devenir « homme en soi » ? Penses-tu que nos descendants ne trouveront plus aucun préjugé, aucune barrière à renverser, contre lesquels nos forces n’auront pas suffi ? Ou t’imagines-tu que tes quarante ou cinquante ans t’ont mené si loin que les jours qui suivront n’auront plus rien à te retrancher et que tu es dès à présent un homme ? Les hommes de l’avenir lutteront encore pour mainte liberté que nous ne sentons pas même nous manquer. Que fais-tu de cette liberté future ? Si tu voulais ne t’estimer rien avant d’être devenu homme, tu attendrais jusqu’au « jugement dernier », jusqu’au jour où l’homme et l’humanité auront atteint la perfection. Mais d’ici là tu seras sûrement mort : où est le prix de ta victoire ?

Renverse donc résolument les termes et dis-toi : Je suis homme ; je n’ai pas à commencer par acquérir