Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/291

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du maître du peuple, la puissance monarchique ; le servage ainsi monopolisé n’en devint que plus écrasant. Ce n’est jamais qu’en faveur d’un monarque, que ce monarque s’appelle Prince ou s’appelle Loi, que les privilèges sont tombés. En France, il est vrai, les citoyens ne sont pas serfs du roi, mais en revanche ils sont serfs de la loi (la charte). La subordination persiste ; seulement, l’État chrétien ayant reconnu que l’homme ne peut servir deux maîtres à la fois (son suzerain et le prince, par exemple), tous les privilèges ont été donnés à un seul : il peut de nouveau placer l’un au-dessus de l’autre, et créer des « haut placés ».

Mais que m’importe le bien public ? Par là même qu’il est le bien public, il n’est pas mon bien, mais le suprême degré de l’abnégation. Je puis avoir le ventre vide pendant que le bien public festoie, l’État illumine peut-être tandis que je crève de faim. La vraie folie des Libéraux politiques, c’est d’opposer le Peuple au gouvernement, et de parler de droits du Peuple. Ils veulent que le Peuple soit majeur, etc. Comme si un mot pouvait être majeur * ! Seul l’individu peut être majeur. De même toute la question de la liberté de la presse n’a plus ni queue ni tête, si on prétend faire de cette liberté un « droit du Peuple » : elle est simplement un droit ou pour mieux dire une conséquence de la force de 1’individu. Si c’est le Peuple qui a la liberté de la presse, moi, bien que je fasse partie de ce Peuple, je n’en jouis pas ; une liberté du Peuple n’est pas ma liberté, et si la liberté de la presse est une liberté du Peuple, elle sera nécessairement flanquée d’une loi sur la presse dirigée contre moi.

Ce qu’il faut surtout bien faire valoir en présence des tendances libérales actuelles, c’est que :