Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/311

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aux intentions du gouvernement. » Mais son État démocratique doit, lui aussi, avoir de l’ « unité » ; comment s’y passer de la subordination, de la soumission à la — volonté du Peuple ?

« Dans un État constitutionnel, tout l’édifice gouvernemental repose en définitive sur le Régent et dépend de son sentiment » (p. 130). Comment pourrait-il en être autrement dans un « État démocratique » ? N’y serais-je pas également régi par le sentiment populaire, et cela fait-il pour Moi une grande différence de dépendre des sentiments d’un Prince ou de dépendre des sentiments du Peuple, de ce qu’on nomme l’ « opinion publique ? Si, comme Edgar Bauer le dit avec raison, dépendance équivaut à « rapport religieux », le Peuple restera pour Moi, dans un État démocratique, une puissance supérieure, une « majesté » (la « majesté » est proprement l’essence du Dieu et du Prince), avec laquelle je serai dans un rapport religieux. — Et le Peuple souverain serait irresponsable comme l’est le régent constitutionnel. Tous les efforts d’Edgar Bauer aboutissent à un changement de maître. Au lieu de vouloir libérer le Peuple, il aurait dû s’occuper de la seule liberté réalisable, de la sienne.

Dans l’État constitutionnel, l’absolutisme a fini par entrer en lutte avec lui-même, parce qu’il a abouti à un antagonisme : le gouvernement veut être absolu, et le Peuple veut être absolu. Ces deux absolus se détruiront l’un l’autre.

Edgar Bauer s’indigne de ce que le roi constitutionnel soit donné par la naissance, c’est-à-dire par le hasard. Mais quand « le Peuple sera devenu l’unique puissance dans l’État » (p. 132), n’est-ce pas à un hasard pareil que nous devrons de l’avoir pour maître ? Qu’est-ce donc que le Peuple ? Le Peuple n’a jamais été que le corps du gouvernement ; c’est plusieurs corps sous un même bonnet (couronne de prince) ou plusieurs corps sous une même constitution. Et la constitution