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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/351

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travailler à s’élever au rang des autres et à les surpasser, voire même à les ruiner, les dépouiller et leur arracher jusqu’aux derniers lambeaux de leur fortune. Cela prouve à toute évidence que, devant le tribunal de l’État, chacun n’a la valeur que d’un « simple individu » et ne doit compter sur aucune faveur. Surpassez-vous l’un l’autre, enchérissez l’un sur l’autre tant que vous voulez et tant que vous pouvez ; moi, l’État, je n’ai rien à y voir. Vous êtes libres de concourir entre vous, vous êtes concurrents, et la concurrence est votre, position sociale. Mais devant moi, l’État, vous n’êtes que de « simples individus ».

L’égalité, que l’on a théoriquement établie en principe entre tous les hommes, trouve sa mise en application et sa réalisation pratique dans la concurrence, car l’égalité * n’est que la libre concurrence. Tous sont, vis-à-vis de l’état, de — simples particuliers, et dans la Société, c’est-à-dire vis-à-vis les uns des autres, des — concurrents.

Je n’ai pas à être autre chose qu’un simple particulier pour pouvoir concourir avec tout autre homme, sauf le Prince et sa famille. Cette liberté était jadis impossible, attendu qu’on ne jouissait de la liberté de se faire valoir que dans la corporation et par la corporation. Sous le système des corporations et de la féodalité, l’état accordait des privilèges, tandis que sous le régime de la concurrence et du Libéralisme il se borne à accorder des patentes (brevet donné à un candidat et établissant que telle profession lui est ouverte [patente]).

Mais la libre « concurrence » est-elle bien réellement « libre » ? Est-elle même vraiment une « concurrence », c’est-à-dire un concours entre les personnes ? C’est ce qu’elle prétend être, puisqu’elle fonde justement son droit sur ce titre ; elle est née, en effet, du fait que les personnes ont été affranchies de toute domination