Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/251

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suis-je encore un non-homme, quand cet homme qui se dressait devant moi comme mon idéal, ma mission, mon essence, mon concept et m’apparaissait dans un au-delà, je le rabaisse à mon moi propre, à ma propriété inhérente, de sorte que l’homme n’est pas autre chose que mon humanité, mon état d’homme, et que tout ce que je fais est humain parce que je le fais et non parce que cela correspond au concept « homme » ? Je suis réellement l’homme et le non-homme et je suis en même temps plus qu’homme, c’est-à-dire que je suis le moi qui possède cette qualité en bien propre.

Finalement on devait en arriver à ceci que l’on exigeât de nous non plus d’être chrétiens, mais hommes ; car quoique nous n’eussions jamais pu devenir réellement des chrétiens et que nous fussions toujours restés de « pauvres pécheurs » (le chrétien étant un inaccessible idéal), cependant l’absurdité n’en était pas si manifeste et l’illusion était plus facile qu’aujourd’hui où, à nous qui sommes hommes et agissons en hommes et qui ne pouvons faire autrement que d’être tels et d’agir ainsi, on impose la condition que nous soyions hommes, de « vrais hommes » .

Les États d’aujourd’hui, encore tout imprégnés de leur mère l’Église, imposent aux leurs toutes sortes d’obligations — comme par exemple le devoir religieux — qui ne les concernent nullement comme États ; mais il n’en nient pas d’une manière générale l’importance quand ils veulent être considérés comme des sociétés humaines dont l’homme en tant qu’homme peut être membre, quand bien même il est moins privilégié que d’autres membres participants ; la plupart admettent les adhérents de toute secte religieuse et reçoivent les