Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/269

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Quel droit serait donc né avec moi ? Le droit d’aînesse, le droit d’hériter d’un trône, de jouir d’une éducation de prince ou de seigneur, ou encore si je suis fils de pauvres gens, de recevoir l’instruction gratuite, d’être habillé par la caisse des pauvres et enfin de gagner une pitance de pain et de hareng au travail des mines ou sur le métier de tisserand ? Ne voilà-t-il pas des droits innées, des droits qui me sont venus de mes parents par la naissance ? Vous pensez que non ; vous pensez que c’est abusivement qu’on les appelle des droits, et ce sont précisément ces droits que vous cherchez à abolir au moyen du droit inné réel. Pour fonder ce droit vous réduisez l’homme à sa plus simple expression et vous affirmez que chacun par la naissance est égal à l’autre, parce que chacun est homme. Je veux bien vous concéder que chacun naisse homme et par conséquent que les nouveaux-nés soient égaux entre eux. Mais pourquoi le sont-ils ? Uniquement parce qu’ils ne se manifestent pas autres que de simples enfants des hommes ; ce sont purement et simplement de petits hommes. Mais par là aussi ils sont différents de ceux qui ont déjà fait quelque chose de leur personnalité, et qui ne sont plus seulement « enfants des hommes » mais encore enfants de leur propre création. Ces derniers possèdent plus que de simples droits innés : ils ont acquis des droits. Quelle opposition, quel champ de bataille ! C’est la vieille lutte des droits innées de l’homme et des droits acquis ; on ne manquera pas de vous opposer ces droits acquis. Les deux parties se tiennent sur « le terrain du droit » car chacun des deux a un droit contre l’autre ; l’un a le droit inné ou naturel, l’autre le droit acquis, c’est-à-dire bien acquis.