Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/425

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à travailler au mieux de leurs intérêts en s’associant à d’autres dans ce but, c’est-à-dire « en sacrifiant une partie de leur liberté », non au bien de tous, mais au leur propre. Un appel à l’esprit de sacrifice et à l’amour désintéressé des hommes devrait avoir enfin perdu son apparence trompeuse, car que reste-t-il d’une expérience qui a duré des milliers d’années ? — Rien que la misère d’aujourd’hui. Pourquoi alors toujours attendre en vain que le sacrifice nous apporte des temps meilleurs ? Pourquoi ne pas les espérer plutôt de l’usurpation ? Ce n’est plus de ceux qui donnent, ce n’est plus des hommes désintéressés et pleins d’amour que vient le salut, mais de ceux qui prennent, de ceux qui s’approprient (usurpateurs), de ceux qui sont leurs propres maîtres. Le communisme et, consciemment ou inconsciemment, l’humanisme qui médit de l’égoïsme, comptent encore sur l’amour.

S’il arrive que la vie en commun soit un besoin de l’homme et qu’il se trouve favorisé dans ses intentions par la communauté, en retour, elle lui impose bientôt ses lois, les lois de la société. Le principe des hommes s’élève au-dessus d’eux à la puissance souveraine, il devient leur Être suprême, leur Dieu et, comme tel, leur législateur. Le communisme donne à ce principe les conséquences les plus rigoureuses, et le christianisme est la religion de la société, car l’amour, comme le dit justement Feuerbach, bien qu’il ne le pense pas aussi justement, est l’essence de l’homme, c’est-à-dire l’essence de la société, ou de l’homme social (communistique). Toute religion est un culte de la société, de ce principe qui domine l’homme social (cultivé) ; aussi aucun Dieu n’est-il le Dieu exclusif d’un moi, mais toujours celui d’une société ou d’une communauté, que ce soit celui