Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/127

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on retirera aux résolutions attribuées à Noé, à Abraham, de Moïse l’impulsion venue de Dieu (procédé sur lequel tombe en plein le blâme de De Wette, rappelé plus haut). 3o Le fait qui est au fond sera saisi de la façon la plus simple, la plus générale, sans détermination des circonstances accessoires (cela est encore trop là où il n’y a absolument aucun fait au fond). Par exemple, on réduira ainsi le récit du déluge : lors d’une grande inondation dans l’Asie antérieure, il périt beaucoup d’hommes, méchants suivant la légende (c’est déjà ne pas faire abstraction de la téléologie) ; Noé, père de Sem et homme pieux (encore de la téléologie !) se sauva à la nage. Mais les circonstances plus particulières de cette conservation, la nature du navire qui a pu servir, etc., on ne doit pas essayer de les déterminer, pour ne pas tomber dans l’arbitraire. De même, relativement à la naissance d’Isaac, on doit se contenter de dire : le souhait et l’espérance du riche et religieux émir, Abraham, d’avoir un héritier de sa femme Sara s’accomplirent tardivement d’une manière inattendue (interprétation contre laquelle les objections de De Wette conservent toute leur force).

Semblablement et avec un esprit encore plus exclusif, Eichhorn se déclara contre le point de vue de De Wette dans son Introduction à l’Ancien Testament. S’il était désagréable aux orthodoxes de se sentir troublés dans leur foi historique par l’invasion de l’explication mythique, les rationalistes n’étaient pas moins décontenancés en voyant qu’elle rompait le tissu serré de leur travail restaurateur, et que tous les artifices de l’explication naturelle devenaient subitement une peine perdue. Ce n’est qu’à regret que le docteur Paulus laisse arriver jusqu’à lui le pressentiment que peut-être on s’écriera, en lisant son Commentaire : À quoi bon tous ces efforts pour expliquer historiquement de pareilles légendes ? et n’est-il pas étonnant que l’on veuille traiter des mythes comme de l’histoire, et rendre intelli-