Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/149

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La religion chrétienne tient de la religion hébraïque la connaissance de l’unité et de l’immuabilité de Dieu. Si le Christ naît, croît, fait des miracles, souffre, meurt et ressuscite, ce sont les actes et une destinée du Messie, et, au-dessus, Dieu demeure dans son immuable identité. Ainsi, en tant que le mot mythologie est pris dans le sens indiqué plus haut, le Nouveau Testament ne connaît pas non plus de mythologie. Cependant, en face de l’Ancien Testament, la position est quelque peu changée. Jésus s’appelle le fils de Dieu, non dans le même sens que les rois théocratiques qui ont porté ce titre, mais comme engendré véritablement par l’esprit divin, ou parce que le Verbe divin est incarné en lui. Or, il ne fait qu’un avec son père, et la plénitude de la divinité réside en lui ; donc il est ici plus que Moïse ; agir et souffrir ne sont pas chez lui des choses extérieures à la divinité ; et, bien qu’il ne faille pas se représenter le rapport de la divinité avec Jésus comme un rapport de souffrance pour la nature divine, néanmoins ici, d’après le Nouveau Testament, et surtout d’après la doctrine subséquente de l’Église, c’est toujours un être divin qui vit et souffre, et ce qui lui arrive a une valeur et une signification absolues. Ainsi, en appelant mythe une histoire des dieux, on pourrait admettre que, de ce côté, le Nouveau Testament participe, plus que l’Ancien Testament, du caractère mythique. Mais, si l’on insiste pour donner à l’histoire de Jésus le titre de mythique, il faut remarquer que cette dénomination non seulement ne préjuge rien sur le fond de la question historique, mais même est sans importance aucune pour la solution à intervenir. En effet, c’est l’immuabilité de Dieu qui ne peut souffrir aucune atteinte ; or, l’entrée en une existence passagère comme celle du Messie, laissant en dehors cette immuabilité, ne contredit pas l’idée de Dieu ; donc l’histoire évangélique, bien que portant la désignation de mythique, pourrait encore être vraie historiquement.