Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

quelles au reste je compte revenir plus en détail dans un autre travail) s’opèrent les plus essentielles de ses transformations, et entre autres les transformations religieuses. Tant qu’on n’a pas conçu l’humanité comme un être immense étendu dans le temps, on n’a pas conçu l’histoire.

De quelque côté qu’on prolonge le regard soit dans le présent sur le globe, soit dans le passé, on aperçoit les hommes groupés par croyances plus ou moins compréhensives. Si l’on demande à ces croyances leurs origines, les plus récentes, le mahométisme et le christianisme, se rattachent au judaïsme ; le bouddhisme indien s’est détaché du fond polythéistique du brahmanisme ; le magisme ou doctrine de Zoroastre vient d’un même fond ; le judaïsme émane de l’Égypte et des plaines assyriennes ; enfin les polythéismes et les fétichismes divers s’enfoncent dans la nuit des siècles anté-historiques. Ces grandes créations, qui constituent la vie morale de l’humanité, sont dues à des efforts successifs qui ont été consignés et déposés en des légendes sacrées ; légendes auxquelles la saine raison comme la saine histoire ne peut attribuer un autre caractère que celui du sol d’où elles sortent ; et ce caractère, toujours plus élevé à mesure qu’on s’élève dans l’échelle des religions, a été, sauf les aberrations inhérentes, d’organiser la société, de la régler, de la moraliser, de la sanctifier.

La critique a donné le nom de mythes à ces légendes. Retenus dans la mémoire, recueillis dans les temples, inscrits dans les livres, ils sont devenus le patrimoine d’immenses sociétés qui y trouvent un aliment tout préparé. L’empreinte du temps et du lieu où ils sont nés y est marquée d’une manière indélébile ; et c’est justement cette empreinte qui, dans l’élaboration ultérieure,