passées les choses. En un temps où ni le judaïsme formaliste et étroit des pharisiens ni le polythéisme décrépit du monde gréco-romain ne satisfaisaient plus aux besoins religieux, Jésus se sentit appelé à jeter dans cette masse stagnante le ferment d’une vie nouvelle et plus haute. Son enseignement fut le point de départ de cette régénération, qui, d’abord renfermée dans le domaine religieux, ne tarda pas à modifier profondément toute l’existence des sociétés. D’un Messie temporel que sa nation attendait, il fit un Messie spirituel qu’elle n’attendait pas, mais qui seul pouvait s’étendre sur le monde moral et en renouveler les rouages.
Ses disciples et les communautés chrétiennes qui sortirent de leurs prédications racontèrent la vie de leur Messie, transmirent ses paroles et se firent leur idéal de ses exemples. Ce fut dans cette époque de profonde émotion et de création religieuse que se formèrent les récits consacrés. Mais ces récits aussi n’ont pas échappé aux conditions qui les dominent. Tout pénétrés de l’esprit nouveau que Jésus avait soufflé, ils sont par là en relation avec la rénovation qui se prépare, avec l’avenir qui s’ouvre ; tout réglés par le milieu où ils naissent, ils sont constamment déterminés par les livres sacrés des Juifs. C’est ainsi que s’est formé l’idéal du Christ.
Vues dans leur ensemble, les religions prennent aux yeux de l’homme qui réfléchit un aspect qu’on ne leur trouve pas dans nos histoires si peu historiques ; car le plus salutaire enseignement est de sortir du domaine exclusif où chacune s’enferme. On sait comment le paganisme a été traité par le christianisme, qui le déposséda. C’étaient les démons qui, échappés de l’enfer, avaient séduit les hommes au culte de l’idolâtrie ; c’étaient eux qui se faisaient adorer d’un culte impur