Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/266

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de Justin, qui sortent d’un fond judéo-chrétien, paraissent aussi avoir eu une généalogie comme Matthieu ; car Justin, comme Matthieu, parle, relativement à Jésus, d’une race de David et d’Abraham, γένος τοῦ Δαϐὶδ καὶ Ἀϐραὰμ, d’un sang venu de Jacob par Juda, Pharès et David, σπέρμα ἐξ Ἰακὼβ, διὰ Ἰούδα καὶ Φαρὲς καὶ Δαϐὶδ κατερχόμενον ; seulement au temps et dans le cercle de Justin, l’opinion d’une génération surnaturelle de Jésus avait déjà donné lieu à rapporter la généalogie à Marie au lieu de Joseph[1].

Ainsi, dans les généalogies, nous avons un monument témoignant, d’accord avec des indications venues d’ailleurs, que, dans la première époque chrétienne, en Palestine, un certain nombre de chrétiens, assez grand pour dresser, à différents points de vue, deux différentes généalogies messianiques, ont tenu Jésus pour un homme engendré naturellement. Nous ne voyons dans les écrits apostoliques rien qui prouve qu’une telle opinion ait été déclarée non chrétienne par les apôtres ; elle ne parut telle que considérée au point de vue des histoires de la naissance dans le premier et le troisième Évangile ; et même, après cela, des pères de l’Église la traitent avec une grande douceur[2].


    γελίου διὰ τῆς γενεαλογίας βούλονται παριστᾷν ἐκ σπέρματος Ἰωσὴφ καὶ Μαρίας εἶναι τὸν Χριστόν. Je ne vois pas comment Credner (Beitræge, l. c.) en vient à entendre par généalogie non l’arbre généalogique, mais l’histoire de la naissance. De quelle façon l’histoire de la naissance, d’après Matthieu, aurait-elle pu servir à prouver l’origine purement humaine de Jésus ? Credner peut dire que l’évangile ébionite employé par Cérinthe et Carpocrate n’avait pas les arbres généalogiques, et que, par conséquent, ces hérétiques n’ont pas argumenté de ce passage qui manquait justement à leur livre. Mais il faut faire attention à la tournure que prend Épiphane, après s’être exprimé ainsi sur l’usage fait par Cérinthe et Carpocrate des généalogies, pour passer aux Ébionites : Ceux-ci ont d’autres idées ; en effet, retranchant les généalogies qui sont dans Matthieu, etc. Cette tournure démontre clairement que l’évangile des Ébionites se distinguait de celui, d’ailleurs identique, de Cérinthe et de Carpocrate, par l’absence des généalogies.

  1. Dialog. c. Tryph., 100, 120. Ici encore je ne puis être de l’avis de Credner, qui conteste à Justin la généalogie (l. c., S. 212, 443).
  2. Voyez Neander, K. G., l. c., S. 616.