Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/271

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la faisant inviter par un prêtre d’Isis dans le temple de la déesse, sous le prétexte que le dieu Anubis demandait à l’embrasser. La femme, pleine d’innocence et de foi, y consentit, et plus tard elle aurait cru peut-être mettre au monde un enfant divin, si le misérable, par une amère moquerie, ne lui avait pas appris le véritable état des choses. Venturini s’empare de cette aventure, et il pense que Marie, étant fiancée du vieux Joseph, fut trompée par un jeune homme mystique et amoureux (il en fait plus loin Joseph d’Arimathie !), et qu’elle a, à son tour, en toute innocence, trompé les autres[1]. À ce point, il devient évident que cette explication n’est pas autre chose que le vieux blasphème juif, que nous trouvons dans Origène et dans le Talmud, à savoir, que Jésus s’était dit faussement le fils d’une vierge pure, et qu’il était né de l’adultère de Marie avec un certain Panthère[2].

Toute cette opinion, dont le point culminant est dans la calomnie des Juifs, ne peut pas être mieux jugée qu’elle ne l’a été jadis par Origène, lorsqu’il dit : Puisque les Juifs voulaient substituer quelque chose au récit de la naissance surnaturelle de Jésus, ils auraient dû faire une fiction plus vraisemblable, ne pas accorder, contre leur propre volonté, que Marie n’avait pas été touchée par Joseph, mais nier cette circonstance même, et faire naître Jésus d’un mariage ordinaire entre Marie et Joseph ; au lieu que le mensonge de leur hypothèse frappe aussitôt les yeux à cause de ce qu’elle a de forcé et d’extravagant[3]. Les paroles d’Origène ne reviennent-elles pas à ceci : Du moment que l’on révoque en doute certains traits d’une histoire merveilleuse, il est inconséquent d’en respecter d’autres ; un tel récit doit

  1. Erster Theil, S. 140 ff.
  2. Cette légende a subi diverses métamorphoses où se retrouve toujours le nom de Pantheras ou de Pandira. Voyez Origène, C. Cels., 1, 28, 32 ; Schœttgen, Horæ, 2, 693 et seq., ex tract. Sanhedrin, etc. ; Eisenmenger, entdecktes Judenthum, 1, S. 105 ff., aus der Schmæhschrift, Toledoth Jeschu ; Thilo, Cod. apocr., 1, p. 528.
  3. C. Cels., 1, 32.