Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/278

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dans son sein[1]. Olshausen, dans la première édition de son livre, ajoutait qu’il avouait volontiers que les auteurs de ces explications ne savent pas ce qu’ils font ; on doit lui rendre la même justice, car il ne paraît pas savoir ce que c’est qu’une explication mythique. Autrement, comment aurait-il dit que ce mode d’interprétation n’est propre qu’à favoriser cette opinion blasphématoire sur l’origine de Jésus, et que, par conséquent, tous ceux qui entendent mythiquement le récit évangélique sont disposés à commettre l’absurdité déjà reprochée par Origène aux calomniateurs juifs ? Cette absurdité consiste à conserver dans un récit que, du reste, on reconnaît comme non historique, un trait particulier, par exemple que Marie n’était pas encore mariée ; or, ce trait, n’ayant été inventé que pour appuyer l’engendrement de Jésus sans la coopération d’aucun homme, n’a pas d’autre valeur que cet engendrement même. Aucun de ceux qui admettent ici un mythe dans toute l’étendue du terme n’a jamais été ni aussi aveugle ni aussi inconséquent ; au contraire, tous ont supposé un légitime mariage entre Joseph et Marie, et, si Olshausen attribue à l’explication mythique une absurdité, c’est pour en avoir meilleur marché ; car il avoue que pour le point en litige elle est très séduisante.

  1. Bibl. Comm., 1, S. 47. Theile aussi, bien qu’il voie que, dans l’explication mythique, la conception avant le mariage tombe avec la conception surnaturelle, trouve cependant possible qu’on voulût, tout en rejetant celle-ci, conserver celle-là ; je le renvoie aux règles critiques données dans le § xvi. Avec un peu plus de douceur, Neander (S. 9) pose le dilemme que l’explication mythique doit ici admettre ou une pure fiction, ou une fiction qui contienne au fond quelque chose d’historique, et ce quelque chose ne pourrait plus être que l’image profane et déshonnête dont il est question ; or, l’interprète mythique est nécessairement poussé vers cette dernière alternative ; car la première est en pleine contradiction avec le récit simple et prosaïque de Matthieu. En ceci on ne peut regretter une chose, c’est que Neander se soit interdit d’avance la possibilité de pénétrer dans la nature mythique de certains récits évangéliques, en supposant que le mythe ne peut pas être, même dès son origine, simple et prosaïque. Celui qui ne veut pas trouver des arbres dans la forêt, n’a qu’à convenir avec lui-même que ce qui est un arbre doit avoir l’apparence rouge ; certainement alors il n’en trouvera pas un, si ce n’est peut-être çà et là en automne.