Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/35

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bles ennemis de la série historique et de la raison profonde des anciennes choses ; car eux du moins se font tort par ce qu’il y a de manifestement anti-scientifique dans leurs conceptions. Expliquer les anciennes choses, comme fait l’exégèse mythique, avec sagesse et fermeté, c’est, en les remettant dans leur vraie place et leur vrai jour au sein du passé, leur fermer le mieux la vie présente.

Toute philosophie qui entreprend de modifier les théologies fait une œuvre contradictoire. Toute philosophie qui ne s’incorpore pas les sciences positives fait une œuvre illusoire.

Laissons donc et la théologie et la métaphysique, l’une qui ne peut soutenir, devant le développement moderne, son point essentiel, le miracle, l’autre qui ne peut que constater et aggraver la dissidence, et voyons la situation telle qu’elle est. L’élite de l’humanité est en révolution ; cette révolution a commencé par le schisme protestant, s’est continuée par les commotions qui ont affranchi la Hollande et fondé la liberté anglaise, a eu une éruption terrible dans l’ébranlement de la société française, et évidemment est encore loin de son terme. Le plus frappant symptôme de cet état révolutionnaire, c’est l’élimination, à des degrés divers, des idées théologiques en une foule d’esprits, dont d’ailleurs le nombre va toujours croissant ; et il va croissant parce que le progrès incessant des sciences naturelles mine de plus en plus la croyance au miracle, fondement de toutes les anciennes sociétés. Ces esprits forment, dès à présent, une classe nombreuse dont les ramifications s’étendent dans tous les rangs de la société, et même dans tous les partis ; le parti conservateur en renferme aussi bien que le parti révolutionnaire. Ce sont eux qu’il s’agit de rallier à un idéal