Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/44

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monde du moyen âge se reproduit. Les efforts de restauration sont impuissants ; la révolution pénètre de jour en jour plus avant et rend la reconstitution de l’ordre ancien plus impossible. En même temps, ce qui est la compensation de l’anarchie croissante, l’industrie prend la prépondérance et éloigne la guerre ; les sciences se développent avec une rapidité merveilleuse ; et l’homme, en présence de ce grand spectacle, effrayé des ruines qui s’accumulent, ravi des lumières qui rayonnent, est suspendu entre la crainte et l’enthousiasme, s’abandonnant tantôt aux regrets rétrogrades, tantôt aux entraînements de l’avenir.

C’est de la sorte que parallèlement au développement scientifique a marché le développement historique ou social, ou plutôt ils n’en font qu’un, s’aidant mutuellement et se servant tour à tour de marchepied et d’échelon. De la sorte aussi est nettement marqué le sens de cette évolution. Nul ne peut contester le progrès incessant du savoir ; de quelque côté qu’on porte les yeux, la science moderne dépasse la science antique. Là se mesure sans erreur l’essor successif des générations ; à proportion aussi, l’homme individuel se sent plus dépendant de l’Humanité ; il l’embrasse dans une plus grande portion, soit du temps, soit de l’espace ; il reçoit une plus large part de cette influence collective qui à la fois illumine, moralise et sanctifie, jusqu’à ce qu’enfin, toutes les limites particulières de siècle et de nation se dissipant, on n’aperçoit que l’Humanité immense qui, depuis l’origine de l’histoire, grandit pour nous faire grandir, se perfectionne pour nous perfectionner, et épanche d’une source toujours plus abondante le bon et le beau, l’utile et le vrai.

L’histoire donc a révélé l’Humanité ; et maintenant, à son tour, l’Humanité nous montre ce qu’est l’his-