Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/43

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deur est ineffaçable. Mais bientôt tout s’abîme ; ni les institutions religieuses, ni les institutions politiques ne peuvent résister à la critique dissolvante de la métaphysique. En vain Rome avec son puissant génie de conquête et d’organisation prend la direction des choses, elle-même tombe dans la fournaise qui consume tout l’ancien monde ; les hommes d’État signalent le mal sans pouvoir le guérir ; et son office, office immense, se borne à agrandir le domaine de la civilisation, à y absorber de grandes nations situées au Nord, et à faire reculer la barbarie jusqu’au delà du Rhin et aux confins de la Germanie. Le monothéisme judaïque, transformé, transforme à son tour la société vieillie. Une morale plus générale et plus pénétrante s’étend sur la terre ; la hiérarchie féodale se fonde, et, instituant le servage, élimine définitivement l’esclavage. L’industrialisme prend une extension considérable ; d’heureuses découvertes, d’heureuses applications agrandissent immensément les ressources communes. La civilisation chrétienne pénètre jusque dans les profondeurs les plus inaccessibles du Nord, là d’où les Césars virent arriver leur ruine, là où Charlemagne lui-même n’avait pu porter ses armes victorieuses ; et le moyen âge prépare dignement l’âge moderne. Mais à quel prix ? au prix d’une révolution qui dure encore. Le monothéisme, qui avait imposé silence aux libres penseurs nés au sein du polythéisme, n’eut pas la même puissance contre ceux qui naquirent en son propre sein. Aussi, après le grand signal donné par la Réformation, qui brisa définitivement l’autorité spirituelle, les dissidences religieuses et les troubles politiques agitent périodiquement l’Occident. Plus on s’avance vers le temps actuel, plus le tumulte croît. La situation de la transition entre le monde antique et le