Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/473

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drait admettre que leurs récits ont reçu une addition traditionnelle. Continuons à examiner la partie visible de la scène : on ne niera pas que, pour exprimer ou des nuages se divisant avec rapidité, ou des éclairs, on ait pu dire que les cieux s’entr’ouvrirent ; mais la forme d’une colombe n’a pu être attribuée ni à un éclair ni à un météore. Or, non seulement la forme de l’oiseau est, dans Luc, précisément le terme de comparaison ; mais encore elle l’est aussi, sans aucun doute, dans les autres narrateurs. Fritzsche lui-même prétend, il est vrai, que, dans Matthieu, les mots : comme une colombe, ὡσεὶ περιστεράν, se rapportent seulement à la rapidité du mouvement. La colombe n’a dans son vol rien d’assez particulier pour que, si la comparaison eût porté sur le vol, l’un des quatre passages parallèles n’offrît pas une variation, la substitution d’un oiseau différent, ou toute autre désignation. Le fait est que, dans les quatre récits, la colombe, περιστερά, se retrouve comme terme constant ; il faut donc que la comparaison ait porté sur une particularité exclusivement propre à la colombe, et ce ne peut être que la forme. Ainsi ceux-là font au texte la moindre violence, qui imaginent une colombe véritable. Paulus entreprend une rude tâche lorsqu’à l’aide d’une masse d’observations zoologiques et autres, il tente de montrer que la colombe est un oiseau familier qui, sans invraisemblance, peut avoir volé vers un homme, comme il est dit ici[1] ; mais qu’une colombe ait plané assez longtemps au-dessus de quelqu’un pour qu’on puisse dire : elle s’arrêta sur lui, ἔμεινεν ἐπ’ αὐτόν, c’est ce qu’il n’a pas rendu concevable ; et il a échoué même contre le récit de Jean, auquel il s’était pourtant référé comme ne parlant pas de la voix.


  1. Comparez, au reste, Euseb. H. E., 6, 29.