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Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/119

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Espoir ! Elle se soûlait avec les portefaix des halles
Et fouillait la poche des vieux messieurs pâmés.
Sainteté ! Nulle n’avait offert plus de cierges
À ce sacré bougre de Saint-Antoine de Padoue.

Elle puait l’alcool, le tabac, les dents pourries
Et rien ne la rendait heureuse comme de prendre un gosse,
De l’écraser contre la poche à venin qu’était son ventre,
Et de le renvoyer empoisonné dans sa famille,
En se chantant : « Encore un bourgeois de foutu !
Ça doit être le cinquante troisième
En attendant que la police des mœurs
M’envoie à Saint-Lazare. »

Pain amer de la désolation !
Vinaigre cuisant de la haine
Sur les plaies et les pustules des pauvres !
Voir, en faisant le trottoir, tous ces yeux,
Ces innombrables yeux qui ne vous voient pas
Quoiqu’on ne demande que l’aumône d’un désir !

« Viens donc, mon beau blond, je serai bien cochonne ! »
Cloches de Pâques, sonnez. Et vous, premières communiantes
Venez jeter des fleurs sur la pauvre putain !
« Viens, je te ferai ce que tu voudras »
Sœur de charité, aurez-vous donc moins de pitié que moi,