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Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/144

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table, négligé de lui réserver tout l’encens.

Jacques Daurelle et moi fûmes les premiers à parler, à Paris, d’Oscar Wilde. J’estime inutile de répéter à son propos ce que j’ai déjà écrit. Je ne saurais rien ajouter aux admirables articles que lui consacrèrent MM. André Gide et Ernest La Jeunesse. Je n’ose même pas publier un pauvre petit billet où Oscar Wilde, qui avait, au moment de sa fortune, rendu service à tant d’ingrats, me demandait une somme infime, « afin », disait-il, « de finir ma semaine ». Il est des désastres si tragiques qu’on ne peut les respecter que par le silence.

Je confirme en passant ce que raconte Retté au sujet de la composition de Salomé. Un jour Oscar Wilde me remit son drame qu’il avait écrit très rapidement, de premier jet, en français, et me demanda d’en corriger les erreurs manifestes. Ce ne fut pas chose facile de faire accepter à Wilde toutes mes corrections. Il écrivait le français comme il le parlait, c’est-à-dire avec une fantaisie qui, si elle était savoureuse dans la conversation, aurait produit, au théâtre, une déplorable impression. Un ami me racontait récemment qu’en sa présence, Oscar Wilde termina le récit des aventures d’un roi (car les héros de Wilde étaient toujours des rois) par cette phrase : « Et puis, alors, le roi il est mouru. »