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Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/172

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de fréquenter les pires bistros de la petite, de la trop petite ville. Puis Verlaine se laissa mener une ou deux fois au poste de police, où le respectable Cazalis dut aller le réclamer. Enfin, par gaminerie, il manifestait une admiration excessive, publique et scandaleuse, pour certain Ganymède en marbre qui orne le jardin public d’Aix-les-Bains. Je crois que, sans risquer de passer pour un immonde bourgeois, il est permis de compatir aux tribulations de l’excellent homme que fut Jean Lahor.

Je me souviens d’une soirée assez amusante passée en compagnie de Verlaine et d’Edmund Gosse, le grand poète, romancier et critique anglais. Celui-ci avait un vif désir de faire la connaissance de Verlaine. Son physique l’intéressait autant que son moral. Verlaine avait déjà fait des conférences en Angleterre, où son crâne vaste, bosselé et socratique, bien en lumière sous les ampoules électriques avait impressionné un public qui ne comprenait mie à sa parole. Nous cherchâmes donc Verlaine dans ses repaires habituels du Quartier Latin. Nous le trouvâmes enfin, en compagnie de l’affreuse Eugénie Krantz, chez un marchand de vins de la place Saint-Michel. Il portait un cache-nez qui lui montait jusqu’à la bouche et un grand chapeau de feutre mou qu’il avait rabattu sur son front. Edmund Gosse ne